Fabian Hidalgo (FACIR) introduit la séance.
Objectifs de la réunion :
- faire le point sur la nouvelle interprétation de l’ONEM
- trouver des pistes de solutions
Suzanne Capiau expose la situation.
La Belgique est comme une île en Europe, avec ce statut pour artistes créateurs et interprètes, via l’article 1bis. Ce 1bis a donc fait apparaître aux yeux de l’ONEM des artistes invisibles jusque là, par exemple scénaristes, circassiens.
Cela a donc permis l’accès au salariat à de nombreux artistes, ce qui fait peur à tous les gouvernements depuis. Elle estime que l’offensive vient du gouvernement, et ne fait que commencer.
Romain Leloup résume la règle du cachet.
La règle du cachet ne s’applique qu’à deux conditions : effectuer des activités artistiques et être rémunéré à la prestation. Ce type particulier de rémunération est défini comme la rémunération payée lorsqu’il n’existe aucun lien direct entre la rémunération perçue et le nombre d’heures de travail. Elle peut s’utiliser tant pour des contrats de travail avec lien de subordination que pour des contrats « 1bis ».
L’ONEM estime que les CCT au sein des CP 304 et 303 fixent une durée de travail en heures par semaine. Romain Leloup conseille de demander aux employeurs une attestation précisant qu’en réalité le travail n’est pas limité par horaire, afin de pouvoir valoriser ces contrats « au cachet ». Si le travailleur arrive à prouver que la réalité du travail n’est pas liée à un horaire, il peut faire valoir ça au cours d’un procès.
Il conseille, actuellement, de contester directement la décision de l’ONEM, auprès de l’ONEM, dans un délai de 3 mois, mais aussi de faire un recours devant le tribunal de travail.
Suzanne Capiau : Depuis 1964, l’ONEM a appliqué la règle du cachet (conversion des rémunérations en heures et jours de travail) de manière souple, par exemple cela couvrait les répétitions. Aujourd’hui l’ONEM ne reconnaîtrait plus les répétitions.
L’interprétation actuelle de l’ONEM va aussi fragiliser les artistes pour l’accès à la période protégée, etc. Une cause possible : l’ONEM argue de la fraude pour restreindre l’accès au « statut ».
Elle dit qu’il faut se battre politiquement pour défendre ce statut.
Philippe Schoonbrood : c’est un combat politique.
A la réunion de la CP 304 de ce matin, ils ont obtenu que la présidente de la CP 304 demande par écrit au cabinet de Kris Peeters le retrait de cette note ONEM. Consensus entre employeurs et syndicats sur l’insécurité juridique qui en résulte : cette interprétation est inconséquente. Des dossiers similaires introduits avant et après la note seront traités différemment par l’ONEM, ce qui crée une différence de traitement.
Philippe Schoonbrood propose d’introduire un rapport de force politique pour obtenir gain de cause plus rapidement. Tout ça a commence au printemps 2017 par une interpellation d’un parlementaire N-VA sur le (trop grand) nombre d’artistes bénéficiant du statut. La commission des affaires sociales a été saisie du dossier et a demandé au CNT de rendre un avis. Celui-ci a rendu un avis intermédiaire le 28 novembre 2017.
Tout est remis en question: Philippe Schoonbrood pense qu’on peut obtenir un vrai statut, que c’est le moment d’agir.
Nicolas Simon présente le point de vue de Hors Champ et d’autres associations : il faut supprimer cette distinction artificielle entre artistes et techniciens. Parlons plutôt d’intermittents. Le « statut » doit tenir compte du contexte de travail : par exemple tous les travailleurs sur un tournage ont les mêmes conditions de travail, ils participent tous à la création artistique. Ils doivent donc tous avoir les mêmes droits.
Suzanne Capiau dit qu’il manque de statistiques.
Selon Eurostat il y aurait en 2016 en Belgique 0.6 % d’artistes. Alors que dans d’autres pays, par exemple les pays scandinaves, il y aurait 1,2 % d’artistes. On se trouve donc dans la moyenne basse et cela contredit les arguments de type « il y a trop d’artistes »
Le projet suggéré dans l’avis intermédiaire du CNT 2601 (la plateforme d’enregistrement en ligne du travail artistique) serait dangereux car ce seraient les administrations qui fixeraient les listes de métier, etc..
Romain Leloup précise que les chiffres concernant le travail artistique existent mais ne sont pas compilés, ni transmis.
Les derniers chiffres transmis datent de 2014. Il y avait à l’époque environ 10.000 chômeurs indemnisés reconnus comme artistes (5.000 à Bruxelles, 2.500 en Flandre, 2.500 en Wallonie)
Mais c’est la seule information que l’on ait. Quel type de prestation, la durée du chômage, si ils bénéficient d’autres avantages, on ne sait pas.
Philippe Schoonbrood propose que le travailleur atypique devienne un laboratoire pour tirer tous les travailleurs vers le haut, plutôt qu’un laboratoire du capitalisme pour tirer tous travailleurs vers bas. Car les artistes sont en quelque sorte, et malgré eux, à la pointe de l’évolution du travail.
QUESTIONS – RÉPONSES
Q : Pourquoi la CCT de la CP 304 ne spécifie rien sur les contrats à la tâche ?
R Capiau : la rémunération à la tâche est une notion particulière du droit de la sécurité sociale, Cela est distinct du droit du travail (par exemple les CCT) qui lui fixe durée du temps de travail et rémunérations minimales. Et aujourd’hui l’ONEM veut mélanger les deux (droit sécurité sociale et droit du travail) à son avantage.
R Leloup : La tâche n’existe que dans le droit de la sécurité sociale. Les CCT, notamment dans les CP 304 et 303.01, ont été mises en place pour protéger les travailleurs. La reforme de 2014 a introduit cette notion de tâche, ce qui contredit la législation précédente. Et cette loi de 2014 ne correspond pas à la réalité du travail artistique de tous les travailleurs. Donc il y a une insécurité juridique.
R Schoonbrood : C’est un débat aussi dans les syndicats. Si on refond la règle du cachet, il faut augmenter ses minimums, ses barèmes de conversion.
R Capiau : Les CCT fixent des minima, on peut négocier plus.
Remarque du public : la prestation artistique à la tâche c’est la porte ouverte aux heures supplémentaires non payées. Alors que les CCT fixent des horaires, c’est contradictoire. Elle dit que lier tâche et cachet ça exclut actuellement les artistes qui travaillent en dehors des CCT artistes. Il ne faut pas croire que tous les artistes bossent à la tâche, c’est faux.
Q : Y a-t-il une différence entre « contrat pour un travail nettement défini » et « contrat à la tâche ». Quid si dépôt de dossier à l’ONEM ?
R Leloup : Il existe actuellement 4 types de contrats : CDD, CDI, nettement défini et 1bis. Tous peuvent être conclus a la tâche. Si vous déposez votre dossier à l’ONEM cette semaine, joindre preuves, mais risque de devoir passer au tribunal du travail.
Q :Précisions sur le visa, 1bis, Commission Artistes ?
R Capiau : La rémunération à la tâche c’est une notion de sécurité sociale, pas de droit du travail. On convient d’un prix forfaitaire pour une tâche précise.
La seule différence entre les types de contrat, c’est le lien de subordination. Si lien subordination, on applique les CCT etc. Sinon on est dans une activité indépendante, pas de subordination ni de cotisations ONSS, mais cotisations INASTI. Elle pense qu’il y a convergence entre ces deux modes travail, vu l’évolution du travail. Aujourd’hui cette relation de subordination évolue, les critères se précisent.
R Leloup : Le 1bis est un engagement sans lien subordination, il n’est pas soumis aux CCT. Il ne peut donc pas être déduit, d’un contrat « 1bis », qu’il est soumis à un horaire de travail en raison d’une CCT.
Q : Certains bureaux chômage ne prendraient plus en compte les répétitions sous contrats ?
R Leloup : Si le contrat est rémunéré à la durée et qu’il y est mentionné les répétitions, il n’y a pas de souci. Si à la tâche, seul compte le nombre de jours convertis selon la règle du cachet.
Un employeur dit son malaise car les artistes demandent des contrats à la durée ou à la tâche selon leur situation. Il préférerait faire des contrats à la durée.
Réactions d’employeurs qui refusent de faire aux artistes une attestation (à fournir à l’ONEM) pour préciser que le contrat est conclu pour une « tâche », car cela contredit le contrat de travail à la durée passé avec le travailleur.
R Leloup : Il y a des contradictions entre droit du chômage et droit social. Il y a du travail à faire sur la règle du cachet, car la rédaction de la règle de conversion de 2014 du cachet en jours est boiteuse.
Q: Quel risque pour l’employeur de faire des attestations ?
R Leloup : il n’a pas entendu parler d’employeurs ayant eu un souci pour avoir fait ce genre d’attestations. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a aucun risque. (cette information est donnée à titre informel)
Proposition : toute prestation pourrait être transformée en cachet ? Pour finir d’ergoter ?
R Simon : réexplique que le 1bis a été conçu pour permettre aux intermittents d’être assimilés à des salariés, plutôt que forcés à être indépendants.
D’autres réactions pour prôner les contrats à la durée plutôt qu’à la tâche. Ce qu’on proposerait ici (attestations de l’employeur, preuves de travail) sont ses solutions boiteuses, qui déforceraient les CCT.
Romain Leloup clarifie en disant qu’ici on propose des solutions dans l’urgence, mais qu’on ne pousse pas à faire des contrats à la tâche, pour dissiper le malentendu.
Fabian Hidalgo (FACIR) explique le contexte de cette réunion : réaction a chaud à la note de l’ONEM, pour clarifier la situation et proposer des réponses. On ne prône certainement pas la sortie des CCT. On ne va pas refaire le statut aujourd’hui à la Bellone. Par ailleurs, on bosse sur le statut dans nos associations de travailleurs, venez à nos réunions. C’est chouette de voir tous ces gens qui viennent à des réunions comme celles-ci, mais si tous les gens présents aujourd’hui venaient aux réunions régulières des associations professionnelles, ça ferait avancer nos combats.
Q : Commission artistes : qui y siège, y a-t il des artistes ? Sont-ils élus ?
R Gaëtan Vandeplas : Il y a trois représentants des artistes, et des représentants syndicaux, patronaux, ONSS, INASTI et ONEM. Les membres de cette commission ne sont pas élus, mais désignés par la ministre des affaires sociales.
Q : Quelle est la volonté de la ministre Greoli sur le statut au fédéral, etc… ? Nécessité de se mobiliser pour montrer qu’on refuse cette note de l’ONEM ?
R Simon : Greoli a lancé un groupe de travail inter-cabinets ministériels entre fédéral et communautés. Les associations professionnelles ont demandé à être associés à ce groupe, mais on reçoit un discours assez politicien, rien de concret n’arrive.
Par ailleurs Hors Champ et ProSpere seront reçus mercredi 6 décembre à la Commission artistes , on va parler de l’emploi artistique, et bien sûr de l’actualité ONEM. Quant à la mobilisation, il faudra sans doute se mobiliser.
R Capiau : Remettre en cause le statut actuel n’est pas une bonne idée, car on va vers un pire si on le détricote. Il y a évidemment des ajustements à opérer, mais faire table rase est une mauvaise idée.
Q ? Rapport de force ? Syndicats ?
R Schoonbrood : propose de tenir les artistes au courant de ce qui se passe dans les comités, aux réunions de la CP304, etc.
Nicolas Simon ajoute que, en dehors de ce coup de chaud, il existe des associations professionnelles, qui travaillent sur le long terme, donc impliquez-vous aussi dans les associations, car elles ont besoin de vous.
Fabian conclut en proposant qu’on se revoie dans deux semaines pour faire le point.
Plus d’informations suivront prochainement
Update au 19/12 :
https://www.facebook.com/groups/conseildead/permalink/1669157623143793/